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avertissementCe blog n'est pas un site pornographique. Cependant, il est composé de textes rédigés par un adulte qui ne s'auto-censure pas, et dans lesquels il peut être question de sexualité. For adults only. Sólo para adultos. 為成年人. Nur für erwachsene. Vuxna endast. Voksne bare. Alleen voor volwassenen. Solo per adulti. 大人のみ. только для взрослых. للكبار فقط

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Grâce à de savants calculs et à un sens de l'observation hors du commun, je peux affirmer qu'il y a curieux en train de parcourir ce weblog.

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13 janvier 2012 5 13 /01 /janvier /2012 09:18

obscur vendrediSi 30 millions d’amis et la SPA n’existaient pas, certains de nos voisins, de nos collègues et des usagers de la SNCF auxquels nous nous frottons chaque jour lascivement durant les heures de pointe, n’hésiteraient sans doute pas à clouer sur leur porte un chat noir qu’ils auraient au préalable attiré dans leurs filets avec une barquette de Félix au poulet élevé en batterie. Dans le seul but de repousser le mauvais œil, tel un ophtalmologue du Moyen Âge.

Un siècle de libertinage érudit (le XVIIème, je le précise pour les non érudits) et un autre de philosophie des Lumières (le 18ème, pour les chiffrarabophiles qui ne savent pas lire les croix, les vés et les bâtons romains) n’auront pas suffi à effacer toute trace des superstitions encouragées par les chefs d’une Eglise catholique soucieux d’asseoir leur autorité en décérébrant les cerveaux des serfs, des prévôts et même des rois illettrés.

Certes, après Voltaire et Diderot, il y a eu les pleurnichards du Romantisme, puis Paul Valéry, Alain Proust (à moins que ce soit Marcel ?), Louis-Ferdinand Céline et Benjamin Castaldi. Mais tout de même ! Est-ce une excuse pour toucher du bois avec des doigts sales comme des orteils ? Pour jeter du sel par dessus son épaule gauche, alors que je viens de passer l’aspirateur ? Pour gaspiller la nourriture en se baladant avec une bite de Roger Rappatte au fond de sa poche, alors que celle-ci, généreusement badigeonnée de moutarde, nourrirait une demi-douzaine d’enfants grecs affamés ?

Aujourd’hui, nous sommes le vendredi 13. Et, pour cette seule raison, des millions de superstitieux congénitaux vont aller jeter leur pognon dans ces tonneaux des Danaïdes appelés « Française des Jeux » et « PMU ». Alors que si nous étions le vendredi 12 ou 14, seuls quelques centaines de milliers de zombies, parce que c’est une habitude chez eux, échangeraient leur argent contre des tickets à gratter, à cocher ou à s’essuyer. Notons que ce sont généralement les mêmes qui se plaignent du coût de l’essence, alors que le prix d’une grille de Loto qui finissait autrefois chiffonnée devant le comptoir, parmi les cendres de mégots, et qui finit aujourd’hui chiffonnée devant le comptoir où les cendres de mégots sont prohibées, le prix d’une grille, dis-je, équivaut à celui d’un litre de super (à peu de chose près).

Et que penser de ces gens qui manquent tout juste de se faire écraser dans la rue pour éviter de passer sous une échelle, qui invitent à dîner la belle-mère acariâtre pour être 14 et non 13 à table, qui souhaitent « merde » au lieu de « bonne chance » au conducteur de motocrotte dépourvu de sens de l’humour ? Certains jours, je me sens découragé face à la naïveté de mes contemporains, surtout lorsqu’elle confine à l’obscurantisme.

Pourtant, je sais bien qu’une certaine incommunicabilité entre autrui et moi est tout naturelle : étant taureau ascendant lion, je suis né sous l’influence de Mercure en train de pénétrer Uranus, ce qui fait de moi un esprit éclairé mais solitaire.

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11 janvier 2012 3 11 /01 /janvier /2012 09:03

lire la partie 3

Après avoir tenté vingt mots de passe différents, dont son propre prénom, Jérémy renonça à explorer l’ordinateur du bureau de Jay. D’ailleurs, si sa cession s’ouvrait, son mari ne recevrait-il pas un message pour l’en informer ? Il se résigna à recourir aux bonnes vieilles méthodes et, presque en apnée, le visage empourpré par la honte à l’idée de se faire prendre la main dans le sac, Jérémy commença à ouvrir tous les tiroirs et à fouiller méthodiquement chacun d’entre eux, comptant sur sa mémoire photographique pour remettre ensuite chaque document, chaque objet à sa juste place.

Rien d’inattendu. Des factures, des reçus, de l’argent liquide, de vieilles photos de famille qu’il avait déjà vues, des stylos, une ampoule, des magazines… Une boîte renfermant des carrés de cuir : bizarre, mais pas compromettant, sans doute des échantillons fournis par un magasin où Jay avait l'intention d'acheter une veste ou un manteau. Mais… si, à bien y réfléchir, il y avait quelque chose d’inattendu : le simple fait de ne tomber sur rien… d’inattendu ! Comme si Jay avait craint que Jérémy ne vienne fourrer son nez où il ne fallait pas. Ce dernier s’était préparé, notamment, à tomber sur la correspondance d’anciens amants, ou sur des objets personnels que l’on conserve par attachement mais qu’on serait gêné de montrer… Or, il n’y avait rien, là, susceptible de provoquer ne serait-ce qu’un étonnement légitime.

Enfin, un tiroir refusa de s’ouvrir. Une seconde d’hésitation, puis Jérémy monta l’escalier quatre à quatre et pénétra dans leur chambre. Il entreprit de faire les poches de Jay. Dans un pantalon, sa main se piqua sur un petit porte-clefs en forme de minuscule couteau de tanneur, auquel été attaché une seule et unique petite clef. Ce serait un tel coup de chance… Il redescendit précipitamment dans le bureau, laissa échapper un cri de stupeur quand la clef glissa aisément dans la serrure du tiroir, ouvrit celui-ci et découvrit… un paquet de lettres. Des lettres qu’il reconnut pour être les siennes. Rien de plus.

Si : quelques coupures de journaux. Presque toutes provenaient de journaux français, quelques unes de journaux belges et anglais. Elles avaient trait à « l’Ecorcheur », comme l’appelaient les médias. Jérémy se souvint en avoir entendu parler. Un escroc et un assassin épouvantable qui, depuis au moins cinq ans, avait su masquer son identité et échapper à Interpol. Son mode opératoire était toujours le même : il séduisait et, si possible, épousait ses futures victimes, des hommes comme des femmes, les dépouillait de la majeure partie de leur argent qu’il devait blanchir d’une façon qui restait encore un mystère, et les assassinait. Détail horrible qui tendait à prouver qu’il n’était pas seulement un escroc criminel, mais un psychopathe monstrueux : les cadavres qu’il laissait derrière lui étaient mutilés, un carré de peau prélevé dans une quelconque partie du corps. D'où son surnom.

Jérémy parcourut un extrait du Soir Bruxellois :

UNE NOUVELLE VICTIME DE L’ECORCHEUR ?

C’est une bien épouvantable découverte que la police a faite, samedi matin, dans un immeuble luxueux de la banlieue de Bruxelles. Mme C., gardienne dévouée depuis quinze ans, monte le courrier à M. P., fraîchement marié depuis quelques mois à un homme que la concierge qualifiera à notre envoyé spécial de « délicat et aimable », quand elle s’aperçoit que sa porte d’entrée principale est entrouverte. Craignant d’être indiscrète, mais intriguée, elle pousse lentement la porte, appelle M. P., qui ne répond pas, et entreprend d’explorer l’appartement, qui occupe tout l’étage. C’est dans la chambre qu’elle découvre la scène macabre. M. P., un jeune et riche bourgeois sans histoire, demeure inerte, allongé dans son propre sang. La gardienne manque de défaillir, mais a aussitôt le réflexe d’appeler la police locale.

Le légiste constatera que le corps a été poignardé en treize endroits différents, et qu'un carré de peau a été découpé au niveau du dos de la victime. C’est cet élément sordide qui oriente la police belge et Interpol vers la piste de l’Ecorcheur. C’est ainsi que l’on surnomme désormais le monstre qui a déjà laissé derrière lui au moins huit victimes, toutes saignées à blanc, que ce soit au sens propre comme au figuré. En effet, le point commun des proies de l’assassin aux talents de séduction irrésistibles, c’est une fortune personnelle. Souvenez-vous, l’hiver dernier, à Cambridge (Royaume-Uni), quand…

Jérémy sentit la tête lui tourner. Une fraction de seconde avait suffi à son esprit pour additionner un et un. Non, c’était impossible. Impossible. Une autre coupure de journal, un portrait robot. Non, ce n’était pas lui. Pas du tout la même coiffure, pas le même nez, pas les mêmes oreilles. Mais, pourtant, ce regard, cette bouche ? Il comprenait, il avait toujours su, quelque part au fond de son inconscient.

La maison n’avait coûtée que quatre millions, et non six. Les prétendus deux millions que Jay avait sortis n’étaient que de la poudre aux yeux.

Il avait voulu l’entraîner dans la cave, la veille au soir, parce qu’il n’y avait aucune issue et que c’était l’endroit parfait pour l’éliminer sans difficulté ! Mais… pourquoi l’avoir épargné ?

A cause de David ! Le jardinier avait éventé son subterfuge en venant le mardi et en découvrant que Jérémy était en parfaite santé. Jay avait dû penser qu’il gagnerait du temps en faisant croire au vieil homme que l’absence de son jeune époux, le vendredi, s’expliquait par un voyage de convalescence. Il s’écoulerait de nombreux jours avant qu’on ne signale la disparition de Jérémy, le temps nécessaire pour blanchir un maximum d’argent et disparaître dans la nature !

Mais, maintenant, qu’allait-il se passer ? La folie de Jay, ou plutôt de l’Ecorcheur, ne pouvait-elle pas le pousser à se montrer imprudent et à mettre au plus tôt son plan à exécution ? Sans doute avait-il passé la journée à inventer une nouvelle fable pour expliquer momentanément la disparition de Jérémy à David et pour annuler le contrat avec la société de nettoyage qui venait chaque semaine.

Pas une seconde à perdre : appeler un dépanneur pour la voiture et partir avant le retour de Jay… non, idiot, trop long, trop risqué. Appeler Lucas, qu’il vienne le chercher ! Pourvu qu’il soit encore en ville ! Jérémy se figea en réalisant que la solaire-mobile de son époux venait de s’arrêter devant la maison. Il était revenu ! Déjà ! Il ferma précipitamment le tiroir et courut jusqu'à la chambre pour remettre la clef dans le pantalon. Bon sang, vite, le numéro de Lucas ?

Bonjour. Vous êtes en communication avec le répondeur de Lucas Lecomte, commença la voix enregistrée, mais…

– Mon chaton ! Surprise, je suis rentré ! cria Jay avec tendresse.

Jérémy raccrocha et glissa son portable dans sa poche de jean. Il sut, d’instinct, que Jay avait bel et bien l’intention de le tuer le soir même.

A suivre…

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lire la partie 5

Ce texte est © Jay. Toute reproduction interdite sans l’autorisation explicite de son auteur. 

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7 janvier 2012 6 07 /01 /janvier /2012 08:03

lire la partie 2

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C’était David, le jardinier. Il venait chaque vendredi. On était mardi. Jérémy vint au-devant de lui.

– Bonjour David ! Quel bon vent vous amène ? Vous avez cru qu'on était vendredi ?

– Non, non, je sais bien que ce n’est pas le jour. Mais j’ai reçu un mail de l’arroseur automatique. Il a fait sauter un fusible, faut que je le change.

– Vous avez fait tout ce trajet pour ça ? Vous auriez dû m’appeler, j’aurais pu m’en occuper.

– C’est que je ne voulais pas vous déranger, vous êtes malade, il faut vous reposer.

– Malade ? Moi ? s’étonna Jérémy.

– J’ai croisé M. Wesson, hier, en ville, c’est lui qui me l’a dit. Et aussi que vous partiez demain en convalescence, pour quelques temps, dans une maison de repos, expliqua David en avançant avec le jeune homme vers la maison.

– Jay vous a dit ça ? Vous avez mal compris ! Ou vous confondez avec quelqu’un d’autre.

– C’est possible, admit le jardinier, sceptique, je suppose qu’à mon âge on commence à devenir un peu sénile.

– Mais, non ! Vous êtes en pleine forme ! Moi aussi, il m’arrive de comprendre des choses de travers.

– Remarquez, je trouvais ça bizarre, aussi, de partir dans une maison de convalescence, quand on a à sa disposition une superbe propriété à quatre millions, et qu’on peut très bien faire venir des infirmières à domicile.

– Quatre ? Vous êtes loin du compte ! l’interrompit Jérémy en riant.

– Pardon ?

– La maison... elle nous a coûté six millions, pas quatre !

– Bah ! Mme Henri, de l’agence immobilière, alors que je m’occupais de ses massifs, m’a dit, comme ça, dans la conversation, que vous aviez acheté tout ça quatre millions.

– Vous vous êtes encore trompé ! conclut Jérémy en soupirant.

– Alors, là, non, je suis sûr de moi ! Je me souviens parfaitement que Mme Henri m’a dit qu’elle n’aurait pas pu vendre cette maison plus de quatre millions, frais de notaire inclus ! Et c’est bien la somme que lui a fait virer M. Wesson !

Jérémy se dit qu’il était inutile d’insister, laissa David aller s’occuper du fusible, et revint à ses pensées : devait-il parler à Jay du coup de téléphone de Lucas ? Il n’en avait absolument pas envie, en raison d’une crainte superstitieuse. Il avait le sentiment que parler de la présence de Lucas en ville attirerait celui-ci jusqu’à la maison, comme par enchantement. Il choisit donc de se taire, mais l’idée de mentir à Jay, même par omission, lui pesait sur l’estomac.

La journée passa ainsi, en pensées inquiètes et en menus travaux domestiques, puis Jay rentra alors que Jérémy finissait de préparer le dîner.

– Ta salade est délicieuse, mon chaton, le complimenta Jay. C’est du gingembre que tu as mis dans la vinaigrette ?

– Oui. Je suis content que ça te plaise.

– Après le repas, tu viendras m’aider à la cave, pour étiqueter les bonnes bouteilles que j’ai achetées ?

– Les étiqueter ?

– Oui, je veux poser une RFID sur chaque bouteille, afin d’être tenu au courant de la moindre variation de température.

– Mouais, je ne trouve pas ça très utile. J’irai plutôt marcher un peu pendant que tu feras ça.

– Non ! insista Jay, ça ira plus vite à deux ! Tu vas venir m’aider à la cave.

– A propos de cave, dit Jérémy, comme pour changer de conversation, David, le jardinier, y est descendu pour changer un fusible.

– Aujourd’hui ? Mais, il vient le vendredi !

– Il est venu exprès pour ça. Il ne voulait pas me déranger, parce qu’il savait que j’étais malade.

– Comment ça ?

– C’est toi qui lui aurais dit que j’allais partir quelques temps en maison de repos.

– N’importe quoi ! Il devient sénile, le pauvre vieux !

– Faut croire. Apparemment, il connaît même mieux que toi la somme que tu as versé pour l’achat de la maison : il m’a soutenu que c’était quatre millions !

– N’importe quoi… répéta Jay, pensif.

– Bon, on descend à la cave, alors ? proposa Jérémy, résigné.

– Non ! Pas ce soir, je n’en ai plus envie, répondit Jay d’un ton contrarié, en se levant de table pour aller s’enfermer dans son bureau.

Cette nuit-là, le sommeil de Jérémy fut des plus agités. Il rêva du jardinier, qui lui faisait une scène de jalousie : « Vous ne connaissez rien de Jay ! L’épouser était irréfléchi, irresponsable ! » Puis, il s’aperçut que le jardinier était en fait Lucas, lui expliquant : « Quatre millions, c’est six millions moins deux. Deux millions, c’est la part de Jay. » Qu’est-ce que ça signifiait ? « Connard de jardinier ! vociféra Jay en sortant de table, tu es malade, Jérémy, et tu vas aller en convalescence à la cave, que ça te plaise ou non ! » Soudain, Jérémy se retrouva devant une vieille porte de cave, rongée par les vers. Il tenait une clef aussi grande que sa main, la clef de la seule pièce du château dans laquelle son mari lui avait interdit de pénétrer. Terrifié de sa propre désobéissance, mais ne pouvant faire autrement, Jérémy tourna la clef dans la serrure. Aussitôt, un flot de sang jaillit par l’orifice de la porte.

Jérémy se réveilla brusquement. Le soleil était levé. Jay était parti sans bruit. Impressionné par ses rêves de la nuit, une idée désagréable s’imposa à lui : six mois plus tôt, il ne connaissait pas Jay, et ils étaient désormais mariés. Que savait-il de son passé ? Peu de choses, de grandes lignes tracées par Jay, suffisamment banales pour décourager les questions. Une scolarité exemplaire, quelques récits de voyages aux Etats-Unis, des parents décédés, pas d’autre famille, des études brillantes dans une grande école de commerce, quelques auteurs et films favoris…

Le bonheur offert par sa fortune récente n’était-il pas monté à la tête de Jérémy, au point de le rendre imprudent, en lui faisant épouser un homme dont il ne savait rien ? Il aimait Jay. Oui, il l’aimait. Mais pas au point de jouer à l’autruche. Il fallait prendre une décision : soit il allait passer sa journée à fouiner dans les affaires de son mari, pour y découvrir ses secrets, s’il en avait, soit il prenait sa voiture et partait se promener en ville pour se changer les idées. Il n’hésita pas à opter pour la seconde solution : cela faisait trop longtemps qu’il n’avait pas vu des gens, qu’il restait enfermé dans la propriété, il avait besoin de respirer.

En tournant la clef de contact, il sut immédiatement que quelque chose n’allait pas. La voiture toussa, hoqueta. Puis, il ne se passa plus rien. Par acquis de conscience, il ouvrit le capot, mais sa méconnaissance de la mécanique ne lui laissait pas grand espoir. Si une pièce avait lâché, pourquoi ne lui avait-elle pas envoyé un e-mail ou un SMS ? Il retourna dans la maison.

– Allô, Jay ? Bonjour mon chéri.

– Bonjour mon chaton.

– Figure-toi que ma voiture ne démarre plus.

– Hein ? Comment le sais-tu ? Je veux dire… tu voulais venir en ville, aujourd’hui ?

– Bah, oui, mais mon projet tombe à l’eau. J’appelle un dépanneur ?

– Non ! Ecoute, ne le prends pas mal, mais tu vas te ridiculiser : ce n’est peut-être rien du tout, je regarderai en rentrant ce soir, d’accord ? Ca ne te dérange pas de rester à la maison, n'est-ce pas ?

– Non, non, je vais m’occuper…

En disant ces mots, Jérémy savait déjà parfaitement en quoi allait consister sa principale occupation de la journée.

A suivre…

lire la partie 4

 

Ce texte est © Jay. Toute reproduction interdite sans l’autorisation explicite de son auteur.

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5 janvier 2012 4 05 /01 /janvier /2012 11:14

Outre la fin du monde et de l'euro, l'autre grand événement de l'année 2012 sera, sans conteste, le retour de Dallas dans la petite lucarne (expression désuète, j'en ai conscience, à moins que les petites lucarnes aient désormais un format 16/9). Oui, Dallas, dont les premiers épisodes sont prévues aux USA pour l'été 2012, et qui ne saurait tarder ensuite à débarquer dans l'Hexagone. Attention, il ne s'agit pas d'un remake, mais bien d'une suite ! Et une suite d'intérêt, croyez-moi !

Alors, allez-vous me dire, comment faire pour suivre ce "nouveau" feuilleton quand on n'a pas eu la chance de connaître le premier opus (357 épisodes, de 1978 à 1991) ? Première solution : vous rendre sur un site de fan consacré à la série et tout lire. Mais cela vous prendra environ une semaine, sans manger, sans dormir, sans douche et sans activité sexuelle. Deuxième solution : lisez cet article jusqu'au bout ; dans dix minutes, un quart d'heure tout au plus, la douleur cessera et vous pourrez ensuite briller en société en vous faisant passer pour un expert en Dallas.

Vous me faites confiance ? Alors, commençons...

Les Personnages

http://grenierdelatv.free.fr/dallastj28avril198103.jpg

De gauche à droite, et du second plan au premier plan (bien sûr, cet article nécessite de savoir se situer dans l'espace) :

J.R. Ewing, le méchant ultra-méga-libéraliste,

Sue Ellen, son épouse, rendue alcoolique par les infidélités de son mari et son désoeuvrement de femme du monde,

Jock Ewing, le patriarche, un gros con de Républicain conservateur, que les spectateurs finissent pas aimer parce qu'il est moins méchant que J.R.,

Bobby Ewing, le gentil frère de J.R. depuis qu'il s'est fait retirer par chirurgie les palmes de ses doigts et qu'il ne nage plus en ondulant son corps comme un dauphin,

Pamela, l'épouse de Bobby, à qui son mari offre une boutique de vêtements pour qu'elle ne sombre pas dans l'alcoolisme,

Ellie, la matriarche, interprétée par Barbara Bel Geddes, autrefois égérie d'un certain Alfred Hitchcock, la seule vraie bonne actrice de Dallas, que quand elle pleure vous pleurez aussi,

et Lucy Ewing, la fille de Gary, troisième frère Ewing qui s'est éloigné de sa famille pour avoir sa propre série (Côte Ouest).

Résumé des quatorze saisons :

Les Ewing, rois du pétrole au Texas, vivent tous ensemble, comme une famille de gitans, dans l'immense ranch de Southfork. J.R. travaille étroitement avec son père à la Ewing Oil, mais à la mort du vieux, celui-ci lègue la société à parts égales entre J.R. et Bobby. Le premier est furieux, car il voulait être le seul président de la compagnie. S'ensuivent de nombreuses luttes fratricides.

Les Deux faits marquants à retenir :

Dans l'épisode 21 de la saison 2 (diffusé aux USA en 1979), J.R. choisit un fiancé pour sa nièce Lucie : un très bon parti, avec la famille duquel le "brave" oncle compte bien conclure de juteuses affaires ! Alors, que lui importe que ce garçon soit gay ?

C'est la première fois qu'un personnage homosexuel (qui plus est, non caricatural) apparaît dans une série télévisée ! Il faudra attendre Dynastie (en 1981) pour qu'un personnage gay (enfin, un peu bi, selon les saisons) devienne un personnage de première importance à la télévision.

Dans la saison 7, débarque le personnage de Peter (interprété par Christopher Atkins), un jeune homme aux allures d'ado, dont Sue Ellen, après avoir trompé J.R. avec Cliff Barnes, le frère de Pamela et ennemi juré des Ewing, va tomber amoureuse. Il faut dire que, dans la plupart des épisodes, Peter traîne autour de la piscine de Southfork avec un petit slip de bains bleu très moulant. Si vous voulez comprendre comment Sue Ellen a pu craquer, je vous propose de faire une petite pause et de nous attarder sur quelques photos du garçon :

dallas-atkins-01.jpgchristopher_atkins__23.jpgdallas-atkins-02.jpgChristopherAtkins06.jpgatkins-playgirl-sept82.jpg

La pause est finie. Allez jeter vos kleenex, vous laver les mains, nous allons reprendre.

Aperçus du Dallas version 2012 :

L'action se passe toujours au ranch de Southfork. John Ross, fils de J.R. et de Sue Ellen, est à la tête de la Ewing Oil. Mais, Christopher Ewing, fils adoptif de Bobby et de Pamela (et enfant naturel de Kristin, défunte soeur de Sue Ellen et ex-maîtresse de J.R.) veut orienter l'entreprise familiale vers les énergie renouvelables. S'ensuivent de nombreuses luttes entre les deux cousins.

Christopher (à gauche) et John Ross (à droite), deux acteurs transfuges de Desperate Housewives :

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Parmi les personnages de la première série, on retrouvera aussi J.R., Bobby, Sue Ellen, Ray Krebbs (l'ancien contremaître du ranch, fils illégitime de Jock), Lucy et Cliff Barnes. Bobby sera remarié à Ann, incarnée par Brenda Strong (alias Mary Alice Young dans Desperate Housewives). Et, évidemment, des protagonistes totalement inédits feront leur apparition : Bree Ewing (1), Gabrielle Ewing (2), Lynette Ewing (3), Susan Barnes (4) et Paige Matheson Sumner (5), fille du meilleur ami de Gary Ewing.

dallas.jpg

"Alors, les seuls beaux gosses de la série seront Christopher et John Ross ?" allez-vous me demander, la gorge serrée par la déception. Que nenni ! Au casting, nous aurons également :

Brian Ewing, un cousin qui vient s'installer au ranch :

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Sam Krebbs, fils de Ray, qui devient le nouveau contremaître :

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Cliff Barnes Junior, qui va se faire embaucher à Southfork dans le seul but de séduire John Ross :

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Et Kent, fils caché de J.R. et Kristin, qui va coucher avec Christopher, ignorant que ce dernier est son véritable demi-frère :

d2012-05.jpg

Vous n'avez pas bien vu ?

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Pour finir cette brève présentation du nouveau Dallas, je vais vous révéler en exclusivité le cliffhanger de la fin de la première saison... Tandis qu'il fait sa promenade de santé quotidienne dans le ranch, accroché à son déambulateur, J.R. découvre près des écuries un spectacle effroyable et succombe sous le choc, terrassé par un infarctus. Mais, qu'a-t-il donc vu de si épouvantable ? Nous aurons la réponse au début de la saison 2 :

d2012-07.jpg

Dans un prochain article je vous parlerai de la suite de La Petite maison dans la prairie, prévue aux USA pour 2013, dans laquelle Alan Oleson, fils de Nellie Oleson et de Percival Dalton, va faire de Steven Ingalls Wilder, fils de Laura et d'Almanzo, son esclave sexuel.

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3 janvier 2012 2 03 /01 /janvier /2012 13:38

lire la partie 1

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Jérémy, qui ne se considérait pourtant pas comme passéiste et encore moins comme réactionnaire, se sentait toujours très mal à l’aise face à la technologie RFID. Les puces Radio Frequency IDentification existaient depuis le siècle dernier, on les trouvait notamment dans les cartes SIM des téléphones mobiles. Mais, à partir de 2022, avait eu lieu l’avènement de ce que les médias appelaient « l’internet des objets » : la moindre chose, de l’assiette au livre, en passant par le slip, était désormais dotée d’une RFID qui lui permettait d’être connectée en permanence aux autres objets et aux humains, via internet.

Ainsi, quand vous travailliez sur votre ordinateur, vous pouviez recevoir un e-mail de votre réfrigérateur, vous avertissant que la date du paquet de tranches de jambon allait bientôt arriver à expiration ; et lorsque vous flâniez à vélo, vous n’étiez plus étonné de recevoir un SMS de celui-ci vous signalant que la roue avant avait besoin d’un petit coup de pompe. Comment les objets savaient-ils où vous trouver ? Simplement en interrogeant les puces de vos vêtements !

Si la plupart des gens à travers le monde trouvait cette avancée pratique et indispensable, Jérémy faisait partie de ceux qui craignaient que cette technologie ne finissent par envahir l’espace privé de chaque individu. Mais, n’était-ce pas déjà trop tard ? Votre nom et vos coordonnées se trouvaient de facto inscrits sur la RFID de votre pull ou de votre jean. N’importe quel débrouillard croisé dans la rue, grâce au lecteur inclus dans son portable, pouvait s’approprier ces informations à votre insu. De même, il n’était plus possible de passer devant un magasin sans que celui-ci ne vous envoyât un message publicitaire relatif à la marque d’un habit que vous portiez ou d’un objet oublié au fond de votre sac ou de vos poches.

Jérémy était-il paranoïaque ou était-il réellement harcelé ? Le fait est qu’il devait bien se résigner à ce nouveau mode de vie dont Jay était si friand ! En effet, son mari, passionné par l’Internet des objets, ne s’était pas contenté des puces placées d’emblée dans chaque machin, mais s’était abonné à la plupart des grands réseaux d’objets, dont Stuffbook, et avait ajouté des lecteurs RFID un peu partout dans la maison.

Toutefois, si le bonheur parfait de Jérémy se trouvait parfois entaché, ce n’était pas tant par ce nouveau mode de vie que par le souvenir en filigrane des menaces de Lucas. Son anxiété se manifestait notamment par un cauchemar récurrent. Il découvrait le corps ensanglanté et inanimé de Jay. Lucas était penché au-dessus du cadavre, un couteau de cuisine à la main. Comble de l’horreur : Jérémy se réfugiait dans les bras du meurtrier pour pleurer et se laisser consoler ! Il n’avait évidemment jamais raconté son rêve à Jay, malgré cet étrange sentiment, à son réveil, de prémonition, de mise en garde contre Lucas.

Tandis qu’il sortait le drap de la machine, son téléphone sonna. Lucas.

– Oui ? Pourquoi m’appelles-tu ? demanda froidement Jérémy.

– Tu n’as pas l’air très heureux de m’entendre, constata Lucas.

– Peut-être que les menaces que tu as proféré lors de notre dernière discussion y sont pour quelque chose ?

– Allons, c’était il y a des mois. J’étais malheureux et en colère. Comme on dit, de l’eau a coulé sous les ponts. J’aimerais me faire pardonner. Je serais ravi si tu m’invitais à dîner avec vous un de ces soirs.

– Mais… comment ça ? Tu es où ?

– Eh bien, je suis en ville, à seulement quelques dizaines de kilomètres de votre maison. Je suis venu en vacances, tout seul, à l’hôtel. Est-ce que je peux passer vous voir, toi et Jay ?

– Non, c’est impossible !

– Désolé, dit Lucas, je ne voulais pas être importun, je tenais seulement à te présenter mes excuses et mes félicitations.

– Je voulais dire, se rattrapa Jérémy, que nous avons déjà quelque chose de prévu ce soir. Mais… hésita-t-il, veux-tu venir demain soir ?

– Merci, conclut Lucas après un silence. En fait, je vais peut-être repartir demain dans la journée, je ne sais pas encore, je ne peux rien prévoir. Je te laisse, au revoir.

– Au revoir, répondit Jérémy avec soulagement.

Jusqu'alors, il n'avait jamais regretté de vivre dans cette grande propriété, à l’écart de tout voisin, et sans aucun domestique. A la demande de Jay, qui semblait gêné par l’idée de vivre avec des étrangers sous son toit, Jérémy avait engagé une petit société de nettoyage qui passait deux fois par semaine pour astiquer la maison de fond en comble. Quant à l’entretien du parc, il était confié à David, un homme du village, plutôt âgé, qui venait une fois par semaine. Le reste du temps, malgré sa récente fortune, Jérémy demeurait seul à la maison et s’adonnait aux tâches ménagères. Il prenait un réel plaisir à s’occuper des lessives et à préparer de bons petits plats à son homme. Il ne percevait pas cela comme un sacrifice : il aimait tant son mari qu’il était heureux de contribuer à ce qu’il se sente bien chez eux.

C’était Jay qui avait découvert cette gigantesque maison de campagne, luxueuse, au milieu d’un parc boisé de cinq hectares, à plusieurs kilomètres de la première grande ville. Quand Jérémy l’avait vu, il s’était retrouvé sous le charme de l’endroit. Cette magnifique demeure, tout confort, isolée au milieu d’une nature reposante, constituait le nid idéal pour deux amoureux soucieux de fuir la rudesse d’un quotidien laborieux pour mieux s'aimer.

La propriété leur avait coûté six millions de francs post-euros. Malgré des revenus confortables – il était un homme d’affaires avisé – Jay ne pouvait pas mobiliser un tel capital. Jérémy régla donc quatre millions et, bien qu’il insistât pour financer la totalité de l’achat, il dut se résoudre à laisser Jay payer les deux millions restants, afin de ne pas risquer de froisser sa susceptibilité.

Depuis qu’ils avaient emménagé, ils n’avaient pas regretté un seul instant leur choix. Mais, maintenant, songeant à la proximité de Lucas qui, en conduisant rapidement, pouvait être là en moins de vingt minutes, Jérémy sentit peser désagréablement sa solitude. « Verrouillage des portes et des fenêtres » lança-t-il à la volée. Instantanément, il entendit le cliquetis des serrures se fermant dans toute la maison.

Mais à peine eut-il soupiré de soulagement, se reprochant ses inquiétudes disproportionnées à l’égard de l’inoffensif Lucas, qu’il entendit les roues d’une voiture écraser les feuilles mortes dans l'allée du parc.

A suivre…

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30 décembre 2011 5 30 /12 /décembre /2011 11:59

Allongé sous le drap de satin chamarré qui épousait ses formes les plus intimes, Jérémy regardait Jay, son mari, finir de s’habiller.

– Tu es sûr que tu ne peux pas arriver un peu en retard à ton rendez-vous ? demanda Jérémy encore une fois, passant une main dans ses cheveux châtains.

– Je vois bien ton état d’excitation, mon chaton, ce drap est tellement fin… mais il faudra que tu attendes ce soir, répondit Jay. Et surtout, interdiction de te branler, hein ? Tu te réserves pour moi, je ne veux pas en perdre une goutte !

– Evidemment, acquiesça le jeune homme, sans grande conviction dans la voix.

Un baiser furtif, et Jérémy se retrouva seul dans la chambre. La porte d’entrée claqua, puis, au milieu du chant gracieux des chardonnerets, il perçut le démarrage pourtant silencieux de la solairemobile.

Mince, mais peu musclé, Jérémy n’était pas beau, au sens absolu de l’adjectif, mais, passé le cap des trente cinq ans, son visage s’était épanoui et ses traits adoucis, si bien que ses anciens collègues du lycée où il avait travaillé auraient peut-être eu du mal à le reconnaître. Il faut dire que le Jérémy de naguère s’était toujours montré sec et d’un abord volontiers glacial. Sérieux, zélé et incontestablement compétent, il n’avait jamais cessé de paraître à tous indisponible aux frivolités qui agrémentent l’existence de joies faciles.

Certes, la vie ne lui avait pas fait de cadeau. Pendant douze ans, de vingt-deux à trente-quatre ans, Jérémy avait dû aligner les heures supplémentaires et les petits boulots au noir pour étoffer son maigre salaire d’enseignant, afin de pouvoir subvenir aux besoins de son père impotent qui vivait chez lui. Ce combat de tous les jours pour payer garde-malade et infirmière, ainsi que les longues heures durant lesquelles il s’occupait lui-même de son père, avaient fermé et durci prématurément ce visage qui aurait pu conserver encore quelques années le charme juvénile de l’adolescence.

Bien sûr, il avait connu, au milieu de cette triste existence, quelques rares occasions de trouver le bonheur, qu’il aurait pu saisir au vol. Notamment, il y avait eu Lucas Lecomte, un de ses collègues, un garçon de son âge avec de grands yeux noirs très doux et des cheveux blonds en désordre encadrant un ravissant visage. Jérémy avait toujours su, sans rien laisser paraître, que Lucas éprouvait pour lui de tendres sentiments, mais ce dernier faisait vivre sur son maigre traitement une épouse et un enfant, et ce n’était pas de sitôt qu’il envisagerait de partir avec Jérémy.

Puis, comme dans un roman, la chance, si ce n’est un dieu miséricordieux, avait délivré Jérémy de son pénible fardeau : alors qu’il ne jouait que très rarement, il avait parié un jour sur tous les chiffres gagnants d’un tirage de la loterie européenne. Il remporta soixante cinq millions de francs post-euros, nets d’imposition ! Pour le jeune homme, qui venait de fêter ses trente-quatre ans, ce gain était synonyme de liberté. Il plaça son père dans la meilleure maison de soins du pays, rédigea sa lettre de démission, et se jeta littéralement dans les bras d’un Lucas stupéfait en lui promettant de verser une pension à sa femme et à son fils.

Mais Lucas avait mal réagi. Très mal. Moins que jamais, il sembla enclin à avouer son amour à Jérémy. Il le repoussa de manière hautaine et prit ses distances. Jérémy s’était-il trompé sur son compte ? Non. Il comprit simplement que Lucas était trop fier pour partir avec un homme plusieurs fois millionnaire et laisser celui-ci s’acquitter des engagements qu’il avait pris envers sa famille. Jérémy ne l’en aima pas moins, au contraire. Mais, il s’agissait d’un amour teinté de colère à l’égard de cet orgueil inopportun qui contrecarrait ses projets.

C’est alors que le destin frappa une nouvelle fois : Jérémy rencontra Jay Wesson à une soirée étourdissante organisée par de nouveaux (et riches) amis. Jay, la quarantaine fraîche et pétillante, avait tout pour séduire : une carrure de rugbyman, un sourire enjôleur, des yeux bleu acier et de l’esprit. Jérémy, qui avait cru jusqu’alors que le coup de foudre était une invention romanesque, se sentit comme emporté par un torrent d’allégresse et de folie. Quinze jours plus tard, ils étaient fiancés.

Et Jérémy, tout à son bonheur, ne s’était pas attendu à voir Lucas sortir de sa froide réserve et débarquer chez lui, après avoir lu la nouvelle sur New Facebook, fou de jalousie. Comment Jérémy pouvait-il envisager d’épouser un homme dont il ne connaissait rien ? C’était irréfléchi, irresponsable ! Lui, Lucas Lecomte, l’aimait depuis le premier jour ! Comment pouvait-il lui faire ça ? Il croyait que ses sentiments étaient réciproques ! Mordant, Jérémy lui fit remarquer que tout le monde n’avait pas besoin de dix ans pour déclarer sa flamme, lui confirma qu’il l’avait aimé mais ne pouvait pas l’attendre le restant de ses jours. Il n’y avait rien eu entre eux, et ce « rien » était fini, il devait se faire une raison. Lucas avait éclaté en supplications et même en menaces contre Jay.

Jérémy le mit à la porte, effaré de découvrir la violence dissimulée chez ce garçon qu’il avait toujours connu plein de flegme.

Marié depuis maintenant trois mois, il vivait le parfait amour et les imprécations de Lucas n’étaient plus qu’un vague souvenir qui, parfois, provoquait en lui des pointes d’anxiété.

En ce moment, songeant à son beau Jay, Jérémy ne put empêcher sa main de glisser sous le drap satiné et de saisir son pénis, turgescent au point de sembler prêt à éclater. Quelques mouvements de poignet suffirent à libérer le sperme en jets spasmodiques, sans que Jérémy n’eut le temps de soulever le drap. « Merde, pensa-t-il quelques secondes plus tard, remis de son orgasme, je suis bon pour une lessive. » Son téléphone lui signala aussitôt la réception d’un SMS. Il lut : « Je suis sale, il faut me laver. » Signé : « Le drap de satin n° 388727».

« Bordel de RFID ! » lâcha-t-il.

A peine eut-il mis la machine à laver en marche que le téléphone sonna. C’était Jay.

– Alors mon cœur ? Soit tu as pris ton petit déj’ au lit et tu as été maladroit, soit tu m’as désobéi et tu t’es masturbé…

– Comment tu… commença Jérémy. Ah oui, d’accord ! s’interrompit-il d’un air entendu.

– Eh oui ! J’ai reçu un SMS du drap et un autre du lave-linge ! Je sais donc que tu as été très vilain.

A suivre…

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23 décembre 2011 5 23 /12 /décembre /2011 10:02

Ma complicité avec Kim ne faisait que grandir au fil des jours. Nous passions ensemble des nuits entières à discuter de questions métaphysiques passionnantes, à écrire des nouvelles, et à rire comme je crois que je n’avais encore jamais ri auparavant. Les questions et les remarques les plus saugrenues nous traversaient l’esprit et nous servaient de réflexions pour des heures et des heures de débat : « Le secret permettant de concevoir le néant est-il dissimulé quelque part dans notre cerveau ? », « Notre évolution peut-elle entraîner l’apparition d’un nouveau sens permettant de comprendre ce néant ? », « Comment pouvons-nous être certains que deux individus perçoivent les mêmes couleurs de façon empirique ? », « Si Dieu est éternel, il ne peut être omniscient car il ignore tout de sa naissance. », « Si Einstein s’était trompé et qu’on pouvait dépasser la vitesse de la lumière, quelle serait la meilleure méthode pour voyager dans le temps ? »

Curieusement, jamais nous ne nous prenions la tête, quelle que soit la complexité du problème que nous évoquions. Peut-être était-ce parce que, systématiquement, nous trouvions le moyen de parler de sexe quel que fût le sujet abordé ! Invariablement, nous parvenions à parler de fellation entre l’évocation d’une théorie de la physique quantique et celle du principe de la construction de la psyché. Peu soucieux de nous prendre au sérieux, nous étions plutôt occupés à laisser libre cours à notre imagination afin d’accoucher de synopsis de nouvelles et de romans qui nous resteraient à écrire. Et les fous rires ponctuaient nos élucubrations les plus scientifiques.

Cette complicité nous fut prouvée d’une manière pour le moins étrange et difficilement explicable. Une nuit, je me réveillai après un rêve marquant car extrêmement réaliste : Kim était en compagnie d’Arnaud, un garçon à la beauté ténébreuse qui lui plaisait fort depuis le lycée, mais que nous avions perdu de vue depuis que nous avions quitté l’établissement. Il la pénétrait langoureusement, sur un drap couleur saumon étendu à même le sol. Le lendemain, Kim me téléphona pour me donner rendez-vous au Mac Do. Dès que je vis son large sourire, je compris qu’elle allait m’annoncer quelque chose d’exceptionnelle.

– Alors, pour commencer… je ne suis plus vierge ! dit-elle joyeusement en observant attentivement mon visage pour voir ma réaction.

– Non ! C’est pas vrai ! Depuis quand ?

– Seulement depuis hier soir, enfin cette nuit.

– C’est dingue ! Tu ne vas jamais me croire : cette nuit, j’ai rêvé que tu couchais avec Arnaud !

– Arnaud ?! Arrête ! C’est avec Arnaud que j’étais cette nuit !

– …

– Je l’ai rencontré hier, par hasard, en me promenant au Centre Commercial de Massy. Il m’a invitée à prendre un verre et on a passé l’après-midi ensemble. Le soir, il m’a proposé de dîner chez lui parce que ses parents étaient partis en week-end.

Elle poursuivit en n’oubliant aucun détail de sa première nuit de luxure, y compris en évoquant le fait qu’il l’avait prise par terre dans sa chambre.

– Attends. Tu vas trouver ma question bizarre, mais il avait mis un drap ?

– Non, on l’a fait directement sur la moquette de sa chambre ! Une moquette couleur saumon : ça m’a marquée !

L’été 1996 allait demeurer pour moi inoubliable. Kim m’annonça qu’elle pouvait nous trouver deux séjours d’une semaine en demi-pension dans un hôtel trois étoiles de Majorque, aux Baléares, billets d’avion compris, pour un prix incroyablement bas, à la condition que nous partions huit jours plus tard. Je n’hésitai pas une seconde, même si je savais que toutes les économies accumulées grâce à mes petits boulots allaient y passer, et j'informais ma mère de mon départ. Elle essaya de me faire culpabiliser de lâcher mes parents à trois jours du départ en Loire-Atlantique, insista sur le fait que, si elle avait su, elle aurait pu retenir une location pour deux plutôt que pour trois. Mais devant ma détermination, elle abandonna bien vite. Il faut dire qu’elle avait lâché du lest depuis mon vingtième anniversaire.

Dès l’aéroport parisien, Kim et moi commençâmes à déshabiller des yeux les garçons qui attendaient avec nous l’embarquement, et à faire des commentaires grivois sur l’un ou l’autre de ces spécimens mâles. Mon amie suggéra qu’en revenant de Majorque je ne serais peut-être plus puceau. « A 21 ans, il serait temps ! songeai-je, en soupirant d’espoir. » Kim jeta son dévolue sur un gars ayant la taille d’un basketteur et la carrure d’un jeune rugbyman. Moi, je remarquai davantage un mec brun, de taille moyenne, très mignon, au sourire à se pavaner, et apparemment bien foutu. Nous nous promîmes d’adresser la parole à ces deux-là aussitôt que l’occasion se présenterait.

C’était la première fois que je prenais l’avion, tout m’enchanta, malgré une douleur aigüe qui me vrilla les tympans au moment où nous descendîmes vers l’île. Les lumières de Palma de Majorque, au beau milieu de la nuit, comme des étoiles célestes jetées sur Terre par un dieu capricieux, me parurent féeriques.

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N’ayant encore jamais voyagé, beaucoup de détails m’émerveillèrent : la température de l’air (comment une telle chaleur pouvait être possible ?), celle de l’eau (je n’avais connus que l’Atlantique à 17°C), les us et coutumes de l’hôtel, devoir m’appliquer à parler une langue que je n’avais pratiquée que dans une salle de classe, l’interdiction formelle de consommer l’eau courante, toutes ces petites choses qui semblent banales, sinon rasoirs, pour le grand voyageur blasé.

Notre chambre donnait sur la piscine de l'hôtel : nous bénéficions de la meilleure place pour admirer mon beau brun qui s’était installé, uniquement vêtu d’un short, dans une chaise longue, en compagnie des deux filles qui l’accompagnaient depuis l’aéroport. Je n’en revenais pas en voyant ses abdos depuis notre balcon.

– Il est hyper bien foutu, c’est de la folie ! s’exclama Kim. Dommage qu’il soit homo.

– Comment tu le sais ?

– C’est juste probable : un mec qui part seul en vacances avec deux filles dont aucune d’elles n’est manifestement sa copine…

– Tu crois que j’ai mes chances, alors ?

– Bien sûr ! mais, je te préviens, s’il est hétéro, je me le ferai. Ca ne te dérange pas ?

– Bah, non, si je ne peux pas l’avoir, autant qu’il ne soit pas perdu pour nous deux. C’est quoi le plan… pour l’aborder ? demandai-je.

– Quel plan ? On va lui parler, c’est tout, pas besoin de plan. Nous sommes en vacances ici, loin de chez nous, nous ne le reverrons probablement jamais… On se lâche, Jay !

Cinq minutes après, nous étions à demi-allongés près de la piscine, avec mon séduisant garçon, Kim ayant tout simplement demandé au deux nanas, Delphine et Zoé, si nous pouvions nous joindre à eux. Elles avaient semblé ravies de la rencontre. Et lui aussi. Lui, il s’appelait Franck.

– Kim, c’est ta copine ? me demanda-t-il discrètement.

– Euh, non, c’est ma meilleure amie.

– Ah ! cool !

Que trouvait-il cool ? Que Kim soit libre ? Ou que je sois libre ?

Nous passâmes les jours suivants tous les cinq à nous éclater sur la plage blanche et turquoise, à savourer des cocktails lumineux et frais, à visiter l’époustouflante cathédrale gardée par des statues fantasmagoriques.

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Mais aussi, nous nous adonnions à des jeux puérils, dont le fameux « action-vérité ». A cette occasion, Kim, n’ayant, comme toujours, pas froid aux yeux, demanda à Franck :

– Action ou vérité ?

– Vérité.

– Tu préfères les filles ou les mecs ?

– Je n’ai pas de préférence, je sors avec des filles, mais si j’ai l’occasion de passer un bon moment avec un beau mec, je n’hésite pas !

Plus tard, devant le buffet de la salle de restauration, je fis remarquer à Kim, à grand renfort de coups de coude, que son grand gaillard qu’elle avait remarqué à Paris était à deux pas d’elle.

– Alors, quand est-ce que tu lui parles ?

– Finalement, il ne m’intéresse pas. Je préfère Franck.

– Mais, il a dit qu’il couchait avec des mecs. Et tu as vu comment il m’a regardé en disant ça ? J’ai toutes mes chances !

– Il aime aussi les filles, et il est vraiment canon. Ecoute, on va pas se fâcher, on va le laisser choisir : que le meilleur gagne !

– Mouais.

Je doutais être le meilleur.

Au cours des jours suivants, ni Kim ni moi ne chercha à provoquer Franck, de crainte peut-être que notre amitié n'en pâtisse. Même cette nuit-là où, allongé sur la plage, à la belle étoile, il nous proposa :

– On prend un bain de minuit ?

– Je n’ai pas mon maillot sur moi, s'excusa Kim.

– Justement ! Un bain de minuit, c’est à poil ! rétorqua Franck en riant.

Joignant le geste à la parole, il se déshabilla aussitôt dans la quasi obscurité. Delphine et Zoé firent de même. Kim ne bougeait pas.

– Tu ne veux pas y aller ? lui demandai-je ?

– Non, je n’ai pas très envie de me déshabillée devant tout le monde, même s’il fait nuit.

– Ca t’embête si j’y vais ?

– Non, dit-elle simplement, d’un ton qui laissait croire le contraire.

Je fis comme si je n’avais pas remarqué la manière dont elle m’avait répondu, me mis tout nu et m’élançai en courant vers la mer. Mes yeux, maintenant habitués à la demi pénombre, se posèrent sur Franck qui m’attendait, tourné vers la plage, de l’eau jusqu’au genoux. Je devinais une superbe statue grecque. A la seule différence que cette statue grecque-là semblait être doté d’une queue énorme. J’entrai dans l’eau en bandant, impossible que la diffuse clarté rose et bleue émanant des bars alentours ne lui révèle mon érection. Tant pis ! Kim l’avait dit : nous étions loin de chez nous, nous pouvions nous lâcher, oublier tout complexe, toute retenue ! Il m’accueillit en m’effleurant le sexe du bout de l’index – incontinence instantanée des sensations – et en me déclarant :

Tu n’es pas très très musclé, mais par contre, tu n’es pas mal équipé.

– Ce n’est rien, à côté de toi, dis-je.

Il commença à m’éclabousser, j’en fis de même. Delphine et Zoé se joignirent à nous, à mon grand regret. Ce même regret me rafraîchit les idées et je culpabilisai soudain en pensant à Kim. Je retournai immédiatement sur le sable.

– J’ai préféré revenir, Franck devenait trop tactile, mentis-je à moitié.

– Et alors ? C’est cool, tu aurais dû rester.

– Je sais qu’il te plaît. Je ne veux pas qu’il se mette entre nous.

– C’est gentil. Mais, comme je te l’ai dit, le meilleur gagnera.

Nous demeurâmes silencieux.

Arriva la dernière soirée que nous passions à Majorque. L’hôtel organisa une grande fête. Kim et moi profitions du buffet à volonté et du punch, lorsque Franck passa près de nous sans nous voir. Kim l’agrippa par le bras et lui demanda : « On danse ? » Ce fut alors une succession de danses latines plus lascives les unes que les autres. Kim s’en donnait à cœur joie, frottait son entrejambe, autant que faire se peut, sur les cuisses de mon beau brun. Judas était une femme, et je la détestais. J’avais envie de monter dans ma chambre et de pleurer de déception, quand je vis Franck faire des signes à Kim qui semblaient dire : « Je suis crevé, on arrête ? » Zoé attira immédiatement l’attention de Kim et dansa avec elle, tandis que Franck vint me rejoindre :

Tu as l’air de t’ennuyer, Jay ?

– Non, non… mais je n’aime pas danser, c’est tout.

– Tu préfères l’alcool et le sexe, hein ? se moqua-t-il tendrement. Dans ma chambre, j’ai une bouteille de whisky, tu viens ? Pour le sexe, je pourrai peut-être aussi faire quelque chose pour toi.

Ca y est, nous y étions. Demain matin, je ne serais plus un puceau.

Tandis que je le suivais dans les escaliers, je m’étonnais de trembler à ce point. Gros poids sur le ventre. « Putain ! t’as 21 ans ! Tu vas pas mourir, détends-toi ! Des milliards d’êtres humains l’ont fait avant toi ! »me répétais-je en boucle.

Franck sortit la bouteille promise de sa valise et nous servit généreusement. Deux fois. Dans le silence, nos regards plongés l’un dans l’autre, comme si nous nous défions. « Tu me plais bien, me dit-il à brûle-pourpoint, posant une main sur ma cuisse. Tu es vraiment mignon comme mec, réussit-il à articuler malgré son dégré d’alcoolisation ». J’ouvris la bouche pour répondre, quand nous fûmes interrompus par une fille blonde pulpeuse, que je regardais depuis une semaine comme la pouf’ de service, qui enjambait le balcon de Franck. Elle était, elle aussi passablement éméchée.

« Franckyyyy ! Franckyyyy ! piaillait-elle comme une gourde, tu m’as manquéééé, pourquoi t’es partiiii ? » A mon grand écœurement, il parut satisfait de la voir. « Cool ! s’exclama-t-il en me regardant, Jessica va te sucer pendant que je te prendrai. » Moi ? Sucé par… par… cette fille ? Je ne demandai pas l’argent de mon reste et quittai la chambre.

– Je t’ai vu partir avec Franck, me dit Kim, je ne pensais as te revoir si vite…

– Je n’ai pas pu. J’ai pensé à toi, mentis-je encore. Notre amitié est plus importante pour moi que de coucher avec un mec.

Cette fois, elle parut émue et me serra dans ses bras

– On rentre demain soir, me lamentai-je un peu, y a plus aucune chance pour que je sois dépucelé avant de rentrer en France.

– Non, en effet. De toute façon, tu es un garçon trop sensible : pour ta première fois, mieux vaudrait que tu sois avec quelqu’un qui compte vraiment pour toi et qui tienne à toi.

– Tu crois ?

– J’en suis sûre !

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20 décembre 2011 2 20 /12 /décembre /2011 13:39

Nous déjeunions presque tous les jours ensemble que ce soit au restau u, au Quick, ou un sandwich grec acheté dans le Quartier Latin que nous mangions assis sur les marches d’un escalier peu fréquenté et poussiéreux de la Sorbonne. Nous, c’est-à-dire Sandrine, Jean, Maya (une copine de ce dernier) et moi. Un jour, au cours d’une conversation littéraire, Jean nous révéla, à Sandrine et à moi, qu’il adorait Arthur Rimbaud, qu’il était ému tant par ses textes que par sa biographie. Je vis dans cette déclaration un augure encourageant, la relation de Rimbaud avec Paul Verlaine étant de notoriété publique pour des littéraires comme nous. Je m’empressai d’affirmer que moi aussi j’adorais ce poète, alors qu'en réalité, je n'avais que lu deux ou trois poèmes de lui au collège et au lycée.

Aussitôt après les derniers cours de la journée, convaincu que je tenais là une arme de séduction massive, j’achetais l’intégrale de l’œuvre du poète en livre de poche. Je passai alors la nuit entière à tout lire, préfaces et notes explicatives comprises. Pas seulement pour en mettre plein la vue à Jean, mais aussi parce que j’avais ainsi l’impression de me rapprocher de mon beau blond, de le découvrir davantage, en lisant les vers et les faits marquants de la vie de son auteur favori. A ce point du récit, il convient de préciser que Jean faisait encore partie du clan auquel appartenaient mes parents : celui des personnes à qui je n’avais pas encore osé parler de mon orientation sexuelle.

Le lendemain de ma nuit rimbaldienne, les yeux cernés de fatigue, j’avais bien l’intention de faire comprendre à Jean que non seulement les hommes me plaisaient, mais que lui, tout particulièrement, occupait mes pensées. Pour cela, je n’avais pas l’intention de recourir à la fameuse déclaration « je suis homo », mais de faire de subtiles allusions à la vie et à l’œuvre de Rimbaud, dont je connaissais désormais des pans entiers par cœur.

En fait de subtilité, je déclamai des vers tout au long de la journée.

Au jardin du Luxembourg, ou nous allons nous dégourdir les jambes entre deux cours :

Square où tout est correct, les arbres et les fleurs,

Tous les bourgeois poussifs qu’étranglent les chaleurs

Portent, les jeudis soirs, leurs bêtises jalouses.

En nous rendant à la boulangerie pour nous acheter des sandwiches :

Ils écoutent le bon pain cuire.

Le boulanger au gras sourire

Grogne un vieil air.

Lorsque Jean me fait remarquer que l’hiver va être froid cette année :

L’hiver, nous irons dans un petit wagon rose

Avec des coussins bleus.

Nous serons bien. Un nid de baisers fous repose

Dans chaque coins moelleux.

Quand jean me demande discrètement, en cours de linguistique, si le « y » est une voyelle ou une consonne :

A noir, E blanc, I rouge, U vert, O bleu : voyelles,

Je dirai quelque jour vos naissances latentes.

– Mais, ma parole, finit par lâcher Jean, mi-amusé, mi-agacé, cette nuit tu as appris tous les poèmes de Rimbaud au lieu de dormir ?

– Bah, non, genre j’ai que ça à faire ! C’est juste un poète que j’aime beaucoup, c’est tout…

– Moi aussi, mais le seul poème que je connaisse de lui par cœur, c’est Ma Bohème : je l’avais appris pour plaire à une fille avec que je voulais sortir, au lycée.

C’était la première fois qu’il faisait clairement allusion à ses goûts pour la gent féminine.

Loin de jeter l’éponge, je m’obstinais à me convaincre que tout était encore possible, que Jean était un garçon ouvert d’esprit, et qu’il pourrait se détourner des filles en s’apercevant que j’étais un garçon tout à fait aimable. Ne possédant pas les attributs physiques féminins propres à le séduire, je décidai de l’avoir par l’esprit et l’humour, et, comme jadis, lorsque je partageais la même classe que Cédric, je déployai des trésors d’imagination en réalisant des textes et des dessins propres à titiller les synapses et les zygomatiques de Jean. Bingo ! j’avais l’impression de mettre chaque fois dans le mille : Jean riait, admirait, et me félicitait, tantôt de vive voix, tantôt dans de longues lettres que je finissais par connaître sur le bout des doigts à force de les lire le soir, dans mon lit.

Je créais notamment une petite série de bandes dessinées, dans lesquelles « Doc Jay » dispensait des cours d’éducation hétérosexuelle à Jean. Quelle ironie ! En voici un épisode.

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Mais le temps passait, et ma raison finit par l’emporter. Surtout quand Jean me présenta sa nouvelle petite amie, une jolie rousse que je trouvais drôle et gentille. Je décidai donc de mettre un terme à toute ambiguïté : peut-être que lui et moi nous pourrions au moins demeurer de bons camarades. Ce fut dans un fast-food, autour de cheeseburgers graisseux et de frites vraisemblablement en carton, que je lui lâchais, au détour d’une discussion, mon fameux (et sobre) : « Je suis homo ».

– Ah ! s’exclama Jean. Je me demandais quand tu allais te décider à me le dire. Ca commençait à devenir embarrassant.

– Tu le savais ?

– Bah oui, depuis le début. Sandrine l’a dit à Maya, qui me l’a dit. Tout ça sous le sceau du secret évidemment ! conclut-il en riant. Tu devrais savoir que les filles ne savent pas se taire.

– Et, tu… tu sais aussi que je… t’apprécie… disons… un peu plus que comme un simple copain ? ajoutai-je en devenant écarlate.

– Oui, je m’en doutais. Un beau gosse comme moi, je ne vois pas comment tu aurais pu résister, plaisanta-t-il. Mais, bon, les sentiments ne se contrôlent pas, je ne t’en veux pas, no problemo. Sauf si tu gardes espoir ! Car il n’y a aucune chance pour que je couche avec toi un jour ! Tu le sais, ça ?

– Même si c’était la fin du monde et que nous étions les deux seuls survivants ? lui demandai-je, remis de mes émotions et ayant aussitôt retrouvé ma capacité à déconner.

– Je trouverais bien une chèvre ! Ou je me branlerais. Si nous sommes les deux derniers humains, je préfère avoir un pote qu’un amant !

Voilà comment Jean devint l’un de mes meilleurs copains au cours de mes années à l’université. Nous parlions librement l’un avec l’autre, lui de ses conquêtes féminines et de ses fantasmes, définitivement hétérosexuels donc, et moi des mecs qui me plaisaient et avec lesquels j’allais faire mon apprentissage des relations amoureuses adultes.

 

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19 décembre 2011 1 19 /12 /décembre /2011 16:55

anniversaire.jpgAujourd’hui, c’est le sixième anniversaire de notre PACS. Je croyais que c’était le cinquième, mais Erwann, qui est plus fort que moi en Histoire, m’a détrompé. Conséquemment, nous aurons pour dîner :

un foie gras de canard entier du Sud-Ouest aux 7 épices (cannelle, gingembre, poivre, piment, pavot, anis et coriandre) sur toasts grillés,

de l’émincé de saumon cru parfumé à l’huile d’olive, à la ciboulette et au basilic,

des coquilles de noix de Saint-Jacques à la sauce au vin de Sancerre,  

et des bûches aux mousses 3 chocolats,

le tout arrosé d’un Pinot Gris d’Alsace.

Dès demain, je vais pouvoir les intensifier mes séries d’abdos !!

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19 décembre 2011 1 19 /12 /décembre /2011 11:28

Les jours qui suivirent ne laisseraient dans mon souvenir que des miscellanées d’images et de mots perçues au travers d’un épais brouillard. Chimiquement embrumée, ma capacité mémorielle équivalait alors à celle d’un poisson rouge qui oublie tout en l’espace d’un tour de bocal. De même que celui-ci redécouvre en permanence le salon dans lequel trône son aquarium, de même je m’émerveillais à chaque instant d’être là où j’étais, me demandant quand et comment j’y étais parvenu. Tiens ! je suis dans ma chambre avec Mathieu. Depuis quand est-il là ? Qu’est-ce que je faisais une seconde auparavant pour ne pas m’être aperçu de sa présence ? C’est comme si je venais au monde à l’instant même, étrange sensation…

– C’est nul ce que tu as fait, me répétait-il.

– Tu as eu peur ? demandai-je.

– Non, je savais que tu n’étais plus en danger quand Sandrine m’a tout raconté. Et Bahia, elle le sait ?

– Non ! Elle me le reprocherait et voudrait savoir pourquoi. Toi, tu ne veux pas savoir ?

– Bof ! Ce qui est fait est fait. Ca m’a gonflé surtout parce que ça m’a un peu perturbé, au point que je n’ai même pas pu baiser Marie, avant-hier !

– C’est tout ce qui te préoccupe ?

– Non, c’est juste pour te dire combien ça m’a perturbé, insista-t-il en forçant un peu trop sur le froncement de sourcil mélodramatique. Mais, bon, de toute façon, je la vois tout à l’heure, je vais pouvoir me les vider ! conclut-il en riant.

Je n’en eus pas conscience immédiatement, mais ce fut à ce moment précis que je me détachai de lui. C’était si facile ! J’avais été fou de lui pendant deux ans, et en un instant il me devenait totalement indifférent ! Comprenant que ma mort ne lui causerait comme seul soucis qu’un déclin momentanée de libido, je me retrouvais soudain incapable d’aimer une seconde de plus un individu aussi égoïste. Et ça ne faisait même pas mal ! Mais, pourquoi je me retrouvai tout à coup attablé chez Sandrine, des bouquins d’histoire-géo ouverts devant moi ?

– C’est génial ! s’exclama mon amie, tu connais par cœur toutes les villes du Japon et de la Chine !

– Ah ?

– Vas-y, récite-les encore une fois.

– Euh… je ne les connais pas. Enfin, je ne sais plus.

– C’est tout à fait normal, enchaîna le Docteur Renaud sur un ton qui se voulait réconfortant, les choses vont se remettre en place petit à petit.

Tiens ! je suis dans son cabinet !

– En attendant, lui répondis-je, le bac approche et je ne retiens rien plus de quelques minutes.

– Vous vous inquiétez trop pour cet examen. Est-ce pour cela que vous avez avalé tous ces cachets ? N’y a-t-il pas une autre raison ?

– Bah, comme je vous l’ai dit, ça me stresse d’entendre mes parents s’insulter à longueur de temps.

– Et Mathieu ? Vous me parlez souvent de lui. Vous ne pouviez pas vous confier à lui ?

– Non.

– Pourquoi ?

– Je ne sais pas. C’est mon meilleur ami, je ne voulais pas l’embêter avec ça.

– Les amis sont aussi là pour ça.

– Moi, je ne me confie à personne.

– Pourquoi ?

Je laissai la conversation s’effondrer sur elle-même dans le silence.

– Bon. Nous nous revoyons jeudi.

– D’accord.

Au moins de juin, je fus tout à fait réveillé et apte à passer le bac. Je l’obtins de justesse, mes révisions n’ayant pu me profiter pleinement que depuis peu.

– Eh bien, vous voyez, il était inutile de vous inquiéter autant ! triompha le Docteur Renaud comme si c’était lui qui avait passé l’examen. Tout va bien maintenant, non ?

– Si, si… je crois.

– Mais peut-être n’était-ce pas le bac qui vous préoccupait ? Vous ne semblez pas tellement vous réjouir.

– J’ai de plus gros ennuis que le bac, dis-je sans savoir jusqu’où je pouvais aller dans la confidence.

Depuis ces dernières semaines, le Docteur Renaud avait su gagner ma confiance. Il trouvait les mots justes, paraissait deviner le degré de ma souffrance morale. De plus, il m’avait répété maintes fois, au détour de nos dialogues, qu’il était tenu au secret professionnel, qu’il n’était pas en droit de rapporter en dehors de ces murs quoi que ce fût des propos tenus par moi dans on bureau. Ici, je pouvais m’exprimer comme nulle part ailleurs.

J’avais atteint une intensité de douleur telle que je devais faire confiance à quelqu’un sous peine de perdre la raison. Parler. Cesser de me mentir, mettre des mots sur la vérité, au moins dans ce bureau. Et… et quoi ? Que se passerait-il ensuite. Allais-je voir une moue écœurée déformer le visage de mon médecin ? « Ce genre de perversion ne relève pas de mes compétences. Si vous voulez que nous nous revoyions pour une prochaine séance, ne répétez jamais une telle ignominie, ou je devrai dénoncer le monstre que vous êtes à vos parents et aux autorités. »

– Et quels sont ces « gros ennuis » ? m’interrogea-t-il patiemment, d’une voix bienveillante.

– En fait, je n’en ai qu’un, mais c’est quelque chose de très grave. Ma vie est fichue.

– Ca concerne Mathieu ? lâcha-t-il brutalement.

– Non !… Si. En partie. Je crois… je crois que j’aime les garçons.

– Que voulez-vous dire exactement ? me demanda-t-il avec un sourire complice qui signifiait qu’il avait compris mais qu’il ne se contenterait pas d’une périphrase.

– Je suis… pédé, finis-je par formuler en m’effondrant en larmes.

Je pleurais comme je l’avais rarement fait, mes réserves lacrymales semblaient intarissables. J’étais secoué par des hoquets de sanglots. Je me calmai un peu, après avoir vidé toute la boîte de mouchoirs en papier que le Docteur Renaud m’avait gentiment tendu. Il me demanda avec malice :

– Est-ce si terrible que ça ?

– Evidemment ! m’exclamai-je, l’air indigné. Je déteste les Homos !

– Vraiment ? Pourquoi ?

– Bah… hésitai-je, déconcerté, parce que ce n’est pas normal d’être comme ça. Tout le monde déteste les Homos.

– Ce n’est pas vrai. Moi, qu’une personne soit homo ou hétéro, cela m’indiffère complètement. Et c’est pareil pour la plupart des gens que je connais.

– La plupart ! La plupart !

–Eh bien ? vous voulez être aimé de tout le monde ? Ce n’est pas possible. Personne ne peut être aimé de tout le monde. On a toujours quelque chose qui dérange quelqu’un. C’est humain.

– N’empêche, ce n’est pas normal d’être comme ça ? insistai-je.

– C’est quoi « être normal » ? m’interrogea-t-il en ouvrant de grands yeux incrédules.

Sa question valait toutes les paroles de réconfort que je pouvais espérer. Tous les sophismes qui avaient cimentés mon éducation au sujet de la sexualité, qu’ils proviennent des médias ou de mes parents, volaient soudain en éclat pour retomber sur mon esprit en une poussière apaisante.

Au fil des séances, le Docteur Renaud allait me redonner des bases saines quant à l’appréhension de la sexualité et de la nature humaine, et me permettre de comprendre que j’aurais pu passer à côté de ma vie si j’avais persisté à rejeter ce que j’étais par nature. Certes, notre société ne se montrait pas des plus ouvertes par rapport à l’homosexualité, il faudrait attendre la deuxième moitié des années 90 pour découvrir des Gays et des Lesbiennes non caricaturés sur le petit écran. Jusque là, la seule image de l’Homosexuel diffusée à la télévision, c’était celle de quelques excentriques efféminés filmés à l’occasion de la Gay Pride, les cameramen des journaux télévisés paraissant volontairement laisser dans l'ombre les Homos du défilé dont la sexualité ne s'affichait pas sur les vêtements ou dans l'attitude.

Mais, je me sentais prêt désormais à remonter mes manches pour me faire une place au soleil. J’avais le droit de faire partie de ce monde. Cette prise de conscience fut pour moi comme une seconde naissance. Comme si, jusqu’à présent, j’étais resté en apnée et que j’ouvrais enfin la bouche pour inspirer à plein poumon un vent océanique. Oui, j’étais gonflé d’enthousiasme, mais encore bridé par ma naïveté de nouveau-né.

Ne m’imaginant vraiment pas réunir mes amis dans un banquet pour leur déclarer, après avoir obtenu le silence par quelques coups de couteau sur mon verre, que j’étais homo, je décidai de multiplier les déclarations officielles individuelles.

Je commençai par Sandrine. Nous irions à fac ensemble et serions donc amenés à passer beaucoup de temps tous les deux. Je ne m’imaginais plus jouer la comédie à longueurs de journées, j’étais désormais un garçon libéré des liens du mensonge, et je comptais bien le rester ! A mon sobre et difficile « Je suis homo », elle répondit qu’elle s’en doutait depuis longtemps, qu’elle avait remarqué certains de mes regards posés sur Mathieu. Honnête, elle ajouta que ça lui faisait quand même tout drôle et qu’il lui faudrait un peu de temps pour s’habituer à l’idée. En fin de compte, rien ne changea dans notre relation.

A mon sobre et angoissé « Je suis homo », Mathieu répondit qu’il s’en doutait depuis longtemps, que cela ne changerait rien entre nous, qu’il me considérait comme son meilleur ami. Dès le lendemain, il devint injoignable, et je ne le revis plus jamais. Le Docteur Renaud me permettrait plus tard de comprendre que j’étais devenu comme une sorte de miroir pour lui, et qu’il lui était probablement insupportable de s’y regarder.

A mon sobre et détaché « Je suis homo », Kim, une camarade que je connaissais depuis le collège mais dont je n’avais jamais été particulièrement proche, répondit avec beaucoup d’enthousiasme qu’elle s’en doutait depuis longtemps, que c’était cool et que j’étais son premier pote homo. Nous devinrent d’excellents amis.

Avec le temps, je ne craignais plus d’être rejeté, car je comprenais enfin ce qui était pourtant une évidence : quelle importance d’être mal-aimé de gens dont l’étroitesse d’esprit confinait à l’intolérance, voire à la haine ? Bien au contraire, révéler mon homosexualité devenait un moyen de me découvrir de vrais amis, et non des gens se prétendant les amis du personnage que j’avais accepté d’incarner malgré moi, comme si ma vie était un scénario.

Pourtant, si je progressais rapidement sur le chemin de la raison et de la sagesse, cela ne m’empêcha pas de répéter une nouvelle fois une erreur qui, sans doute, était devenu pour moi un mauvais pli dont je ne parvenais pas à me défaire : dès les premiers jours à l’université, à l’automne 1995, je tombai sous le charme d’un garçon… hétérosexuel. Si je me sentais obligé de me trouver des excuses pour sauver la face, je dirais que Jean – c’était son nom – avait tout du « métrosexuel », terme qui ne serait créé que des années plus tard.

Après l’avoir observé pendant plusieurs jours, avec ses beaux cheveux blonds, son long manteau noir stylé et ses airs de Fox Mulder, je me décidai à faire remarquer son existence à Sandrine qui convint qu’il n’était pas laid. Ni une, ni deux, elle me prit par la manche, me conduisit à Jean et, devant l’entrée du grand amphithéâtre, lui demanda s’il pouvait nous prêter des cours que nous aurions manqués. Nous découvrîmes un garçon fort sympathique avec qui, dès lors, nous passâmes beaucoup de temps.

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Ce texte est © Jay. Toute reproduction interdite sans l’autorisation explicite de son auteur.

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